Fin de vie : « L’ultime demande »

« L’ultime demande », c’est celle que formulent des personnes en « fin de vie » en ce qu’elles se savent condamnées. Lorsque leurs souffrances ne peuvent être apaisées par les soins, ni curatifs, ni même palliatifs, elles demandent parfois à être aidées à mourir, plutôt que d’être contraintes à subir ce qu’elles jugent intolérable, souffrances physiques ou psychiques par exemple en cas de perte d’autonomie ou de possibilité de communication avec autrui.

De nombreux pays ont d’ores et déjà acquis l’expérience de l’aide active à mourir (cette expression regroupe les notions traditionnelles de « suicide assisté » et d’ « euthanasie », c’est-à-dire, en termes concrets, d’auto-administration d’un produit létal pour l’assistance au suicide, ou d’injection de celui-ci par un tiers à la demande du malade pour l’euthanasie) : 

– dans différents pays d’Europe comme au Canada, les modèles reposent essentiellement sur la solidarité entre soignants et patients, en laissant le choix au patient entre auto-administration ou injection du produit létal 

– aux Etats-Unis et dans certains pays du Pacifique, des modèles différents, plus restrictifs quant aux patients qui peuvent en bénéficier, sont à l’inverse parfois ultra-libéraux quant à leurs modalités pour épargner aux soignants toute implication en dehors de la prescription du produit létal. 

En France le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), longtemps réticent à toute aide active à mourir, a enfin ouvert la voie à cette possibilité dans son avis 139 publié en septembre 2022. Il a, en effet, explicitement reconnu qu’il existe des « souffrances réfractaires », physiques ou psychiques, qu’aucun soin ne peut apaiser et pour lesquelles la seule solution pour soulager le malade est de lui faire perdre conscience.

C’est pour ce type de souffrances que la loi Claeys Leonetti du 2 février 2016 a conçu la sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès. Cependant celle-ci ne peut techniquement intervenir que pour quelques heures ou au maximum quelques jours dans la mesure où, au-delà, les risques de réveil pour le malade deviennent trop importants, ainsi que le relève le CCNE. Elle n’est ainsi possible que si la mort du malade va intervenir, à la suite de l’arrêt de tous les traitements, en fait à très court terme.

Or, les souffrances réfractaires peuvent hélas apparaître bien avant que la mort ne s’annonce à court terme. Constatant les « impasses » de la législation française pour les malades subissant de telles souffrances alors qu’ils peuvent encore vivre des mois, voire plus, le CCNE a, pour la première fois, reconnu que seule l’aide active à mourir pouvait dans ce cas répondre à leur demande d’en être soulagés. Le CCNE a pris acte de ce qu’il peut exister une « voie éthique » pour une aide active à mourir dans ces situations, mais il a souhaité que les citoyens en débattent publiquement dans une large « convention citoyenne », puis que le choix soit fait par le Parlement des conditions devant l’encadrer à l’occasion du vote d’une loi sur l’aide active à mourir. Il a demandé que soit engagée en même temps par les pouvoirs publics une réforme profonde de l’organisation des soins palliatifs permettant de les généraliser partout où ils manquent encore. Aucune loi n’est ici nécessaire : il s’agit « seulement » de rendre enfin effective la loi du 9 juin 1999 qui avait d’ores et déjà prévu un droit d’accès aux soins palliatifs !

« L’aide à mourir paisiblement :
une liberté à notre portée»

« Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ? »  Telle était la question posée aux 185 membres de la convention citoyenne qui en ont débattu du 9 décembre 2022 jusqu’au 2 avril 2023. 

Le président de la République a annoncé le 3 avril 2023 qu’un projet de loi sera élaboré d’ici la fin de l’été sur «la base de cette référence solide qui est celle de la convention citoyenne», ce qui introduira l’acte 2 de la réforme à venir. 

Ayant largement anticipé les réponses apportées par la convention citoyenne, le livre « L’ultime demande » compare les différentes expériences concrètes dans le monde concernant la fin de vie, les réponses apportées ici et là notamment en termes de lois, avec leurs atouts et parfois leurs limites, leurs forces et aussi leurs faiblesses.

Le livre propose de façon pragmatique les principales garanties qui devraient figurer dans une nouvelle loi, pour qu’elle assure le respect du « droit à la vie », que Robert Badinter qualifiait de premier des droits de l’homme, mais aussi « des principes de liberté et de dignité qui sont l’essence même de la Convention européenne des droits de l’homme ». Derrière ces principes abstraits, ce sont des enjeux pratiques très concrets qu’il faut prendre en compte pour apporter des réponses aussi claires que possible.

L’objectif doit être d’aboutir à une loi effectivement praticable, dans le respect des soignants comme des patients, pour des fins de vie enfin apaisées. 

Soins palliatifs et aide active à mourir ne s’opposent pas mais se complètent en cas de souffrances réfractaires. La loi à venir et, parallèlement, le vaste chantier de l’amélioration de l’accès aux soins palliatifs doivent offrir à chacun la liberté de pouvoir mourir paisiblement.

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Livre l'ultime demande - Martine Lombard

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