Mon parcours

Je suis universitaire et le revendique fièrement tant cette qualité, qui repose sur le goût d’apprendre comme de transmettre, donne une incomparable liberté de pensée.
J’ai choisi d’être juriste parce que le droit définit les contours du contrat social, nous permet de vivre ensemble, et protège nos libertés (ou hélas, parfois, les menace). J’en aime la rigueur et la précision dans l’emploi des mots, comme condition de l’esprit de nuance.
Enfin j’aime l’action car la liberté de l’universitaire ne peut rester un privilège délectable, elle est un atout pour tenter d’améliorer notre commune destinée et promouvoir concrètement des valeurs fondamentales de solidarité et d’autonomie, de liberté et de respect de la dignité de chacun.nous 

Martine-Lombard-portrait

Crédit photo : Stefan Meyer

Un parcours riche d'une certaine diversité

Née le 17 décembre 1952, j’ai le privilège d’avoir déjà vécu 71 années. Un exemple type de « baby-boomer » devenue « mamy-boomer ». L’avenir nous était grand ouvert : un cursus scolaire en Allemagne, suivi d’études de droit à Strasbourg, m’a permis d’être reçue au concours d’entrée à l’E.N.A. alors que je n’avais pas encore 21 ans. Trop tôt pour une telle école d’application:  j’ai poursuivi des études à Strasbourg, Paris 1 puis à l’Institut universitaire européen de Florence, et rédigé une thèse de doctorat en droit (d’abord lentement tant la beauté de la Toscane avait d’attraits, puis de façon plus rapide et volontaire).

A la suite de l’agrégation de droit public en 1979, je suis devenue professeure à l’Université de Lyon 2 (1980-1983), puis à Strasbourg, comme une sorte de retour vers l’Alma mater (1983-1986), mais suivie d’une interruption de quelques années, tournées vers d’autres horizons.

Pendant ces années de césure, j’ai exercé des fonctions de conseil puis de directrice juridique d’Air France (de 1986 à 1993). Cette belle entreprise découvrait alors les grands vents de la concurrence. Les fortes turbulences qu’elle traversait étaient stimulantes pour la créativité d’un juriste. Aussi ai-je continué à les affronter comme avocate d’Air France – et d’autres entreprises et institutions publiques de 1993 à 2003.

Mais je n’ai jamais pensé quitter l’Université. J’ai eu la chance de redevenir professeure cette fois à Paris-Dauphine (1993-1997), avant d’être élue à l’Université Paris Panthéon-Assas en 1997. J’y ai été notamment responsable du master 2 en droit public de l’économie pendant une dizaine années. Etre  membre du collège de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (2015-2019) m’a par ailleurs confrontée à l’urgence concrète de couvrir tout le territoire en couverture mobile et fibre, grâce à un vrai travail conjoint avec les collectivités territoriales.

Présider les jurys du concours d’entrée à l’ENA en 2008,  puis, près de dix ans plus tard, de l’agrégation de droit public en 2019-2020 m’a enfin offert  le plaisir de découvrir tant de talents et de motivation au sein des nouvelles générations, en leur sachant gré d’être parfois capables de nous surprendre. Les nouveaux collègues issus de ce dernier concours ont eu notamment le mérite d’affronter les temps difficiles du confinement lié à la pandémie de Covid 19, avec ses incertitudes, puis de subir le rythme très rapide des épreuves lors des mois précédant un reconfinement hélas prévisible.

Avec une certaine cohérence dans la fidélité aux valeurs d’indépendance, d’impartialité et de probité des magistrats, j’ai été membre du Conseil supérieur de la magistrature pendant quatre ans, de 2011 à 2015, puis du Collège de déontologie de la juridiction administrative pendant six ans, de 2016 à 2022, et je siège actuellement, en ma qualité de  professeure émérite de l’Université Paris Panthéon-Assas, au Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, pour un mandat de trois ans

Des engagements cohérents

Ma perception du droit est celle d’un outil permettant non seulement de mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons, mais aussi de tenter de le faire évoluer de façon pragmatique, vers plus de solidarité et de liberté tout à la fois.

Cela conduit parfois à sortir délibérément du champ des études destinées aux juristes pour tenter de s’adresser au grand public.

A côté d’ouvrages et articles destinés aux éditions juridiques, deux livres ont traduit ce souci :

  • « L’État schizo », publié en 2008 aux éditions Jean-Claude Lattès, a relevé les préoccupations opportunistes, voire électoralistes, sans souci du long terme, qui ont prévalu trop souvent, sous couvert d’un discours apparent de défense des « services publics à la française ». Mais c’était un double discours, comme le livre le montre par une série d’exemples concrets. Il faisait de l’Europe le bouc-émissaire de choix ou de non-choix en fait bien français. 

A cette époque EDF, par exemple, apparaissait comme une cagnotte quasiment inépuisable. Le livre s’interrogeait, en sous-titre, sur le risque d’un « prochain krach » pour EDF, ainsi que d’autres entreprises publiques.

Une quinzaine d’années plus tard, ces considérations n’ont hélas guère perdu de leur actualité. 

  • « L’ultime demande », publié en novembre 2022 aux éditions Liana Levi, avec pour sous-titre « L’aide à mourir paisiblement : une liberté à notre portée »,  annonçait les travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie, qui se sont inscrits en droite ligne de ses constats.

Il reste à en tirer concrètement les conséquences, en cessant de différer constamment la préparation d’un projet de loi promise depuis le 3 avril dernier pour avant la fin de l’été, puis après la visite du pape, puis avant la fin de l’année, puis en janvier-février et maintenant en mars-avril…

Le livre présente de façon très complète et concrète les différents modèles de législations adoptées dans le monde en la matière, avec leurs avantages et leurs limites.

Il précise pour finir l’essentiel des garanties que doit comporter la loi à venir. 

Le « modèle français » devrait en effet s’inspirer du « modèle européen », plutôt que de faire de la France le cheval de Troie d’un prétendu « modèle américain » qui abandonne les malades au moment le plus critique.